Le Thésée un trésor sous 20 mètres d’eau

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C’est une histoire digne des aventures de Tintin et du Secret de la Licorne. Des archéologues sont sur le point de ressusciter le Thésée, un vaisseau de la flotte royale de Louis XV, coulé lors de la bataille des Cardinaux en 1759. Le Thésée gisait depuis à une vingtaine de mètres de profondeur au large des côtes bretonnes. Et l’épaisse couche de vase qui le recouvre depuis plus de 250 ans l’aurait gardé en très bon état.

Type de navire auquel ressemble le Thésée
Type de navire auquel ressemble le Thésée

Nous sommes le 20  novembre 1759, en pleine Guerre de Sept Ans entre le Royaume de France et le Royaume de Grande-Bretagne. Les flottes des deux ennemis s’opposent lors de la bataille des Cardinaux dans la baie de Quiberon, au sud de la Bretagne. La flotte royale de Louis XV est en pleine débâcle, ses 26  navires sombrent un à un sous les feux ennemis. Tous, sauf le Thésée, un vaisseau de 60 mètres de long et de 74 canons, qui tente de faire demi-tour, mais une fausse manœuvre le fait couler à pic, sombrant d’une vingtaine de mètres dans les profondeurs de l’océan Atlantique. Sur les quelque 600  hommes présents à bord, seulement une vingtaine parvient à se hisser sur l’un des trois mâts du vaisseau pour survivre.

Bataille des Cardinaux.  Français : Bataille des Cardinaux, appelée aussi bataille de Quiberon en 1759. Au premier plan : le vaisseau français le Thésée en train de sombrer. English: The Battle of Quiberon Bay, 20 November 1759. DateEntre 1759 et 1791 Source	nmm.ac.uk Author	Richard Patton (1717-1791)
Bataille des Cardinaux.
Français : Bataille des Cardinaux, appelée aussi bataille de Quiberon en 1759. Au premier plan : le vaisseau français le Thésée en train de sombrer.
Tableau: The Battle of Quiberon Bay, 20 November 1759.
Date Entre 1759 et 1791 – Source nmm.ac.uk – Author Richard Patton (1717-1791)

Les années passent et le Thésée tombe dans l’oubli. Ce n’est que 250 ans plus tard, en 2009, qu’une équipe de passionnés réussit à localiser l’épave. Il leur faut patienter encore cinq ans pour l’identifier. Fin mai, des chercheurs et des scaphandriers prélèvent un morceau de bois. L’échantillon est en très bon état et attend d’être authentifié, mais alimente déjà les fantasmes sur cette épave mythique à plusieurs titres. Sur le plan historique d’abord, leThésée est une archive précieuse, car la lourde défaite de la flotte de Louis XV a entraîné un revirement géopolitique important marquant le début de l’hégémonie de l’Angleterre. Après la bataille, les Français perdent durablement la maîtrise des mers – et avec elle leurs colonies en Amérique et en Outre-mer – au bénéfice des Anglais.

épave du Thésée
épave du Thésée

La découverte du Thésée revêt aussi un intérêt archéologique. Des bateaux comme celui-ci, fleuron de la flotte royale, sont mal connus des spécialistes. Des plans existent, mais le rêve de tout archéologue est d’en découvrir « un vrai ». Un vrai qui, comme Thésée, pourrait livrer de nombreux secrets : comment les matelots vivaient-ils ? Quelles armes transportaient-ils ? D’autant que le Thésée était un vaisseau particulièrement bien équipé, à en croire son « inventeur », comme on appelle celui à l’origine d’une découverte archéologique, en la personne de Jean-Michel Keroullé. En effet, le commandant du Thésée organisait des réceptions somptueuses à bord. Le bateau renferme donc certainement des pièces d’argenterie, une autre manne muséographique.

Y a-t-il un trésor emprisonné dans l’épave du Thésée ?

Dans ces conditions, beaucoup pourraient se prendre à rêver du « trésor » du Thésée. « Le vaisseau ne renferme pas un trésor à proprement parler », prévient Jean-Michel Keroullé, président de la Société d’archéologie maritime du Morbihan. « Sur ce bâtiment de guerre parti pour une longue expédition, précise-t-il, il n’y avait pas de coffres remplis d’or ». Tout au plus quelques pièces d’or, mais aussi de l’argenterie, de la vaisselle, des vêtements… Mais, pour lui, c’est l’épave elle-même qui représente un véritable trésor. Elle serait dans un état de conservation unique, grâce à la couche de 2,5 mètres de vase qui la recouvre depuis le naufrage. Un « milieu de conservation optimal, sans chaleur, sans lumière et sans oxygène », selon Olivia Hulot qui a participé à la découverte en tant qu’experte au Département des recherches archéologiques sous-marines du ministère de la Culture français (DRASSM). Seuls les canons pourraient être oxydés et la mâture brisée.

Plongeur remontant un morceau de bois et une concrétion de fer
Plongeur remontant un morceau de bois et une concrétion de fer

Le Thésée promis a un bel avenir

De quoi alimenter les espoirs des archéologues de remonter le vaisseau à la surface et d’offrir ce trésor à la vue de tous. Il va falloir cependant du temps pour l‘exhumer. Passé cette découverte, place dans un premier temps à l’expertise, puis à de nouvelles fouilles qui auront lieu après la saison estivale, fin septembre, ou au printemps prochain. Pour renflouer le Thésée, c’est-à-dire le remettre à flot, il faudra encore compter 5 à 10 ans et 20 millions d’euros.

L’enjeu est de taille. Si le Thésée est effectivement en bon état, il pourra se transformer en musée. Une perspective qui rappelle l’épopée du Vasa suédois. Ce bateau a sombré dans la baie de Stockholm lors de son voyage inaugural en 1628, avant d’être renfloué en 1961 et de devenir l’une des principales attractions touristiques de la capitale.

[article ci-dessus de Camille Laurent pour RFI]

Un précédent :

Une pareille découverte a déjà eu lieue, on sait donc combien il est difficile et couteux d’entreprendre le renflouage, mais le résultat historique est exceptionnel. Pour mieux vous en rendre compte, je vous présente l’épave du Vasa ce bateau qui coula en baie de Stockholm lors de son voyage inaugural en 1628 et qui, renfloué en 1961, est devenu l’une des principales attractions de Suède. Techniquement envisageable, un renflouement ne pourra pas être réalisé à court terme et s’avérera extrêmement coûteux, reconnaissent les acteurs au dossier. « Il faudra compter plusieurs années et quelque 20 millions d’euros, frais de conservation compris, pour les seules fouilles sous-marines », estime Olivia Hulot. « Vu l’épaisseur de la vase et la turbidité extrême de l’eau, c’est un chantier titanesque. »

Un travail laborieux :

Les fouilles archéologiques sont toujours plus compliquées que sur la terre ferme. Voici une petite vidéo sur une découverte similaire (il s’agit ici d’un bateau de pirate), pour se rendre compte du travail nécessaire à l’identification et désembourbage ou désenvasage d’un navire :

Aventuriers :

Certains plongeurs visitent des épaves en apnée, c’est vraiment surprenant, ce documentaire dure 52 minutes, impressionnant pour les adeptes des fonds marins :

Pour aller plus loin :

Si les trésors vous intéressent vous pouvez également consulter nos précédents articles sur le sujet :

Tresor du Malabar Princess

Trésor de la seconde guerre mondiale

Le trésor des templiers

Trésors enfouis, oubliés

2 commentaires Ajouter un commentaire

  1. jack35 dit :

    A reblogué ceci sur Mer et Océan.

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